Délaissé depuis les années 1990 au profit du tertiaire, l’immobilier résidentiel locatif bénéficie d’un retour en grâce auprès des investisseurs institutionnels français. Son principal atout : des taux de rendement moins sensibles aux aléas économiques que l’immobilier de bureau.
L’immobilier est de plus en plus attractif pour les investisseurs institutionnels. Toutes classes d’actifs confondues, selon une récente étude du département Recherche de BNP Paribas Real Estate, leur patrimoine immobilier a crû de 15 milliards d’euros en 2017 pour atteindre la barre record des 350 milliards d’euros. Un résultat prometteur : depuis 2014, les investissements des institutionnels n’ont cessé de croître dans l’immobilier, progressant à un rythme annuel moyen de 7,4 %.
>>> Estimation d’actifs résidentiels : découvrez le point de vue de nos experts
Le résidentiel monte en puissance
Avec un portefeuille majoritairement constitué de bureaux (61 %), de commerces (17 %) et de biens logistiques (6 %), les investisseurs institutionnels ont continué de privilégier les biens du secteur tertiaire en 2017. Lentement mais sûrement, ils montrent toutefois un intérêt croissant pour l’immobilier résidentiel. De 2013 à 2017, les montants engagés sur ce marché sont passés de 35 à 39 milliards d’euros : une dynamique encourageante, bien que le niveau d’engagement enregistré en 2007 (44 milliards d’euros), soit avant la crise des subprimes, n’ait pas encore été pleinement rattrapé.
Un choc de l’offre qui porte ses fruits
Cette progression de l’immobilier résidentiel s’explique bien sûr par la faiblesse des taux d’intérêt, mais pas seulement. Elle doit aussi beaucoup à la poursuite du plan « Choc de l’offre » du groupe SNI, filiale de la Caisse des dépôts, devenue CDC Habitat en 2018. Lancé en 2013, ce plan vise à soutenir la construction et la rénovation de logements intermédiaires en France. Son impact est néanmoins à nuancer, du fait d’un décalage constaté depuis les années 2000 entre la forte et rapide augmentation des prix des logements et la hausse maîtrisée des loyers. À Paris, les prix des appartements anciens ont par exemple enregistré une hausse de 24,5 % au premier trimestre 2016 (indice notaires-INSEE) tandis que les loyers n’ont augmenté que de 15 % de 2010 à 2016.
Des taux de rendement plus stables
En tout cas, l’immobilier résidentiel a pour particularité d’être plus résilient que l’immobilier d’entreprise en période de crise. Si les bureaux ont toujours la faveur des institutionnels en quête de grosses opérations immobilières et d’actifs louables en une seule fois sur la base de baux sur neuf ans, les lignes bougent en termes de rendement « prime » : « Dans un contexte où les taux d’intérêt sont très bas, les taux de rendement « prime » peuvent s’inscrire en dessous des 3 % pour les bureaux dans le quartier central des affaires de Paris, observe Guillaume Boniface, expert immobilier chez BNP Paribas Real Estate Valuation. Les taux de rendement résidentiels sont beaucoup plus stables face aux aléas économiques ». Le rendement global des logements s’est s’établi à 4,1 % en 2016.
Une liquidité qui intéresse les investisseurs
Mais l’offre en portefeuilles résidentiels de qualité étant atomisée, il devient difficile aux institutionnels d’investir dans des volumes conséquents. D’autant que la gestion d’un grand nombre de locataires en BtoC est lourde d’un point de vue administratif et peu rémunératrice. Néanmoins, cet éclatement de l’offre est également un avantage : il favorise la liquidité des biens immobiliers. Cela permet aux institutionnels de les revendre soit en bloc à d’autres investisseurs, soit à la découpe. On assiste aujourd’hui à un nombre très important de mises en vente d’immeubles lot par lot, au fil des libérations naturelles. Un argument de plus pour faire des biens immobiliers résidentiels des actifs de diversification intéressants, avec une bonne visibilité sur les cash-flows à long terme.
Un contexte démographique favorable
Alors que la densité démographique est toujours plus forte dans les grandes villes, l’offre en matière de logement tend par ailleurs à s’affaiblir. Cette dynamique encourage les investisseurs institutionnels à renforcer leur positionnement dans les zones sous tension, où ils bénéficient de meilleurs taux de rendement. En 2016, AEW a par exemple levé 100 millions d’euros de capitaux auprès d’investisseurs institutionnels dans le cadre de son nouveau fonds Residys. Dédié exclusivement aux actifs résidentiels, ce fonds cible ses investissements vers les villes sous tension – notamment Paris, Marseille ou Bordeaux – et vers les quartiers qui accueilleront les gares programmées dans le cadre du projet du Grand Paris Express (GPE).
« Dans un contexte où les taux d’intérêt sont très bas, les taux de rendement « prime » peuvent s’inscrire en dessous des 3 % pour les bureaux dans le quartier central des affaires de Paris"
Guillaume Boniface
Expert immobilier chez BNP Paribas Real Estate Valuation